Il Volantino Europeo n°19

Janvier 2008

 

Bulletin internautique de l’Association Piotr-Tchaadaev

 

Détail d’un paysage d’Emile Stahl (Alsace, 1847-1938)

Editorial

La langue allemande, pour souhaiter la bonne année, use volontiers de l’expression « einen guten Rutsch ins neue Jahr », une bonne glissade dans la nouvelle année. Est-ce en souvenir d’époques où les hivers étaient plus rigoureux ? La glissade en 2008 est maintenant chose faite, et nous espérons que tout le monde s’en est à ce jour bien remis…

Depuis notre dernier rendez-vous, peu avant les fêtes de fin d’année, l’actualité a été tout sauf réjouissante, l’inventaire en est hélas superflu.

Ne parlons pas des choses qui fâchent, disait-on volontiers en France, vraisemblablement était-ce bien avant Mai 68. Une bienséance petite-bourgeoise, héritière lointaine et mesquine de celle du théâtre classique dont s’enorgueillit notre pays, voulait qu’on s’abstînt, surtout à la fin de repas copieux et arrosés, d’aborder politique et religion.

Mais celles-ci ne sont-elles pas en train de se bouffer le nez partout dans le monde - avec des intensités certes variables - alors pourquoi les éviter, surtout en paroles ?

Parlons donc des choses qui fâchent, aurions-nous envie de dire en ce début d’année. Et la psychiatrie, tout comme la psychanalyse,  en font partie.

Notre prochaine rencontre les 8 et mai 2008 à Budapest sera donc l’occasion de nous confronter, parmi d’autres sujets,  à la question des droits des patients dans une société qui les exclut de plus en plus, d’Est en Ouest et du Nord au Sud. Notre «  fâcherie » sera-t-elle entendue ? Si nous l’argumentons solidement et sans emportements polémiques, nous pouvons l’espérer. Tel est aussi l’un des enjeux du 5ème « Divan sur le Danube », où nous vous attendons nombreux(ses)  et déterminé(e)s.

« Un Divan sur le Danube »

 

Association Piotr-Tchaadaev (Versailles)

N° FMC  Piotr-Tchaadaev   11 78 0511778

Association des Médecins francophones de Hongrie (Budapest)

Société Hongroise de Psychiatrie (Budapest)

 

Avec le soutien du Service de Coopération et d’Action culturelle

de l’Ambassade de France en Hongrie

 

 

V° Colloque centre et est-européen de psychiatrie et de psychanalyse

Budapest, 8 & 9 mai 2008

 

 

Jeudi 08 mai 2008 – Clinique Psychiatrique de l’Université Semmelweis de Budapest, 1085 Budapest, Balassa utca 6., Tel.: 210-0330 (M° Klinikak)  www.semmelweis-medizinstudium.org

10 heures : visite de la Clinique

 

11 heures : Table ronde avec tous les participants présents

 

12 heures 30 – 14 heures 30 : déjeuner

 

14 heures 30 – 18 heures : exposés et discussions

 

Daniel LEMLER (France)  Bases conceptuelles d’une psychothérapie psychanalytique des psychoses //

Laszlo TRINGER (Budapest) Les conséquences psychiatriques des réformes de 2007 en Hongrie //

 

Vendredi 09 mai 2008 – Institut français de Budapest, Fő utca, 17. - 1011 Budapest  Tél: (00 36) 1 489 42 00 (M° Batthyanyi ter)  www.inst-france.hu

 

 

09 heures : accueil des participants

 

09 heures 30 – 11 heures : première partie

 

Daniel ZAGURY (France)       //

Daniel LEMLER (France)  N’être victime  //

Robert KESMARSZKY, Dr HANTOS  (Hongrie)  Aspects des relations médecin-avocat //

Alexandre NEPOMIACHTY  (France)    Devoirs et obligations du patient et du médecin

 

11 heures 30 – 13 heures : deuxième partie

 

Lorenzo TORESINI (Italie) // Ivan MAGYAR (Budapest)

Grazia MIRANTE, Piero CIPRIANO (France, Italie) Curare o legare ? (Soigner ou lier ?) //

 

 

13 heures    13 heures 30 : conclusions et synthèse

 


Le scandale Sarajevo

 

« …Malheureusement, je crains de ne pas être capable d’expliquer sur un mode objectif, et non pas partial, à un lecteur étranger pourquoi on fait ici la guerre. Probablement, on la fait comme toutes les autres guerres, pour la conquête de territoires et pour les pillages. Mais pourquoi sont-ils en train de bombarder une ville d’un demi-million d’habitants du matin au soir depuis les montagnes proches, à cette question je n’ai aucun ‘probablement’… ».

(Nenad Velickovic, Il diario di Maja, Roma, Editori Riuniti, 1995)

 

 

Je vous demande pardon si je vous parle de Sarajevo, est le titre italien d’un recueil d’essais de Marko Vesovic, intellectuel d’origine monténégrine, résistant contre les fascistes serbo-bosniaques durant le siège de la capitale de la Bosnie Herzégovine (1992-1995).  Je vous demande pardon moi aussi, puisque je reviens à en parler, persuadé que s’est jouée là une partie décisive, et ignorée, de notre histoire récente.

 

Sarajevo, un des cœurs vivants de l’Europe, a subi un siège féroce, le plus long de l’histoire du 20ème siècle (1325 jours, plus long que le siège de San Leningrado), dans l’Europe de l’après 89 marquée par l’effondrement du ‘socialisme réel’ ; par l’effort étatsunien (réussi) d’éviter la soudure Union Européenne - Russie ; par des transitions très rapides et violentes vers le capitalisme ; et par les renaissances consécutives de fantômes que l’on croyait ensevelis (nationalismes/fois aveugles et aliénantes/redécouvertes de ‘racines’ rageuses et souvent inventées) et qui, au contraire, alimentés par la crise économique sont ressuscité de manière impérieuse. Tito avait tenté de masquer les différences entre les peuples de sa Yougoslavie sous le slogan volontariste ‘unité et fraternité ‘, avec un succès partiel durant les années où il était au pouvoir, mais qui s’est résolu dans l’horreur des années 90, en une sorte de contrepied. La mort de Tito a été la mort d’un père et celle d’un projet imposant, qui  avait peu à voir avec les cries des autres régimes ‘socialistes’. Si aujourd’hui encore, à Sarajevo comme ailleurs sur les terres de l’ex-Yougoslavie, les gens comme il faut, jeunes et vieux, fleurissent les statues du Maréchal, cela veut dire que quelque chose de bien s’était passé entre 1945 et 1980 : non pas de simples nostalgies (même si une ‘yougonostalgie’ existe), mais une reconnaissance politique. Autrement dit : si les dignitaires de Tito sont presque tous devenus des nationalistes acharnés dans les nouvelles nations nées, il ne faut pas oublier les hommes et les femmes du projet titiste.

 

De la ‘flamme olympique’ de 1984 à ‘Sarajevo en flammes’ de 1992, suggère efficacement Enver Hadzihomerspahic, intellectuel de la ville : c’est ainsi qu’en huit ans s’est consumé le drame du pays des Slaves du Sud, de la splendide ville olympique (« la plus belle ville du monde », en 1984, disent les Bosniaques) au lieu de la mort obscène de faim, de soif, de froid, et à cause de la stupidité infaillible des francs-tireurs.  L’Europe en difficulté et l’ONU, déjà en crise à cause de la Première guerre du Golfe Persique, ne réussissent pas à interpréter le conflit qui a explosé et le lisent comme un des nombreux conflits ‘ethniques’ qui ont éclaté depuis la fin de la guerre froide (1). Si Walter Benjamin dénonçait l’ « esthétisation de la politique » opérée par les fascismes (depuis Marinetti et ensuite), nous voulons pour notre part souligner un autre phénomène : l’ethnicisation  de la politique, fait marquant de la phase historique dans laquelle nous nous trouvons, dans toutes les parties du monde. Des années 80 à aujourd’hui se sont mises en route des recherches de racines et de généalogies, se sont créés des milliers de rites (la fiole avec les eaux du dieu Pô, emportée des sources au delta est une drôle d’idée parmi les autres, déconcertante comme les autres, mais malheureusement non sanctionnée par le ridicule). L’identité devient le mot clé dans la bouche de gens dispersés dont personne ne parlera, comme dans la bouche des puissants qui, après avoir engendré confusion et insécurité par leurs pratiques ultralibérales et source de précarité, proposent les solutions désastreuses de l’appartenance communautaire et des liens du sang, balayant ainsi des siècles de réflexion universaliste/internationaliste et promouvant la ‘reconnaissance du semblable à soi-même’ come chemin vers le salut (les tonalités dominantes sont celles du ‘religieux’). Entre les guerres de bandes des quartiers ‘difficiles’ et le choix de Sarkozy de créer un ‘Ministère de l’immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du développement commun’, « coule du bon sang » **.

Les médias font le reste : si un pirate de la route ou un assassin est d’origine étrangère, la stigmatisation est immédiate, avec les effroyables cas limites de Novi et d’Erba***, et celui opposé du maçon bosniaque Dragan Cigan, noyé dans le Piave le 22 juillet après avoir sauvé deux enfants (« …l’héroïsme ne connaît pas de barrières ethniques… », a-t-on dit, ou encore même un Bosniaque peut accomplir des actes nobles ; et les héros, mais pas les hommes, son tous égaux…).

A l’intérieur de ce développement, mais en plus complexe, se situe le cas yougoslave : des peuples divers s’étaient retrouvés sous le manteau protecteur de Tito qui, en bon ‘habsbourgeois’ qu’il était, a promu une idéologie capable de faire se sentir yougoslaves les Serbes, les Croates, les Slovènes et  les Musulmans, sans oublier les Albanais du Kosovo, les Hongrois de Voïvodine, les Italiens d’Istrie, etc. Il n’est pas possible d’aborder complètement ce thème (confins orientaux de l’Italie, fascisme et différents massacres des foibe*) dans le cadre présent, mais nous pourrons y revenir.  Quelque chose couvait toutefois  sous les cendres et si le 68 tchécoslovaque fut un ‘printemps’ socialiste et libertaire (syntonie entre un groupe dirigeant et son peuple), le 68 yougoslave, qui vit aussi une dissension marxiste et internationaliste, minoritaire et rapidement réduit au silence, a pris surtout des couleurs nationalistes : par exemple,  le ’printemps de Zagreb’ en 1971 fut un premier mouvement fort en ce sens, précédé et suivi de revendications de la part des Musulmans et des Albanais du Kosovo, avec un sentiment général de malaise. La Constitution de 1974, qui accordait une grande autonomie aux républiques et aux peuples, fut le résultat de cette phase et contribua à stabiliser la situation jusqu’à la mort de Tito.

 

L’année 1989 a apporté les plus grands changements statutaires en Europe depuis 1945 : unification à l’Ouest (renforcement de l’Union européenne - au moins du point de vue territorial,  avec la progression graduelle et décisive vers l’Est, et économique -, réunification allemande), dissolutions à l’Est (pacifiques : Tchéquie et Slovaquie ; violentes : URSS dans le Caucase et Yougoslavie). Dans les Balkans, et ceci certainement pas en raison de l’arriération ou de la férocité naturelle de ces peuples, les années 90 ont été traversées par des conflits de forte intensité : les élites politiques issues du communisme investirent leur capital politique dans les malheureuses menées nationalistes, avec le seul but de se maintenir au pouvoir et de réussir à gérer les transitions vers le capitalisme. Ces ‘transitions’ auront pu rapporter des profits énormes à des groupes d’oligarques (comme en Pologne et en Russie), au détriment des peuples, au moins pendant la longue phase d’accumulation, encore en cours aujourd’hui (diminution drastique de l’ ‘espérance de vie’ en Russie, par exemple). C’est ainsi qu’ont été planifiées deux ‘guerres contre les peuples’ : l’une était politique (sous la forme d’une guerre ‘civile’), l’autre économique (libéralisme sauvage), filles jumelles du 20ème siècle le plus pur, du 20ème siècle européen et occidental. Si pour Pavese, toute guerre est une guerre civile, nous savons aujourd’hui que toute guerre est une guerre ‘contre les civils’ : la ligne qui va de Guernica à Londres, Dresde, Hiroshima, au Vietnam, aux ‘deux tours’, à l’Afghanistan – bombes soviétiques autrefois et de l’OTAN aujourd’hui – et à l’Irak, au Liban, au Darfour (terroriser les peuples pour faire tomber les tyrans ou pour garantir la ‘libre’ circulation des matières premières). Et la guerre est encore celle dénoncée par Gunther Anders, la guerre d’en haut, anonyme, qui ne peut « voir dans les yeux un homme qui meurt », en n’ayant même plus besoin d’un pilote dans les bombardiers télécommandés ; et puis déportations de peuples, camps de concentration, crimes de guerre (non pas crimes ethniques mais génocide) ; triomphe du sniper et de la marmaille/soldatesque autorisée au crime sur une route de l’ex-Yougoslavie comme à Abou Graïb ou à Fallujah****, défendue et sanctifiée aussitôt par les gouvernements respectifs, à l’aide de la rhétorique des héros et des martyrs, et de l’exportation de la démocratie. Ceci est arrivé dans les Balkans : non pas des luttes entre barbares, mais triomphe des deux modernisations du 20ème siècle, guerrière et capitaliste, arrivées plus tard en comparaison aux autres pays d’Europe, à cause de la très utile ‘pause/trêve’ du socialisme réel, qui a transformé des millions de paysans de l’Est en une classe ouvrière et bureaucratique désormais  prête à servir le dieu unique du capital. Toni Negri a raison de dire qu’il ne comprend pas pourquoi l’occident en veut  tant à Staline et consorts, alors qu’il devrait lui être reconnaissant de la rapide inclusion de peuples entiers dans le 20ème siècle industrialisé et fordiste, tout comme du balayage de l’arriération rurale, aujourd’hui devenue le bras armé à faible coût dans la paradis postfordiste (2).

(Photographies : Jean-Yves Feberey, janvier 2005)

 

 

A ce point de l’analyse intervient le scandale, dans le sens littéral de ‘pierre d’achoppement’, de Sarajevo, un scandale qui a été contourné et qui aujourd’hui encore ne parvient pas à susciter pensée et réflexion, mais seulement des actions marécageuses et des empêchements ultérieurs. Pour les raisons que j’ai citées plus haut, les guerres yougoslaves n’ont pas été lues sur un mode critique, ce qui a provoqué l’ethnicisation des interprétations du conflit, avec les prises de parti consécutives des parrains respectifs : la grande mère Russie s’est reconnue dans la partie orthodoxe (la majeure partie des Serbes est orthodoxe), en même temps que des puissances historiquement liées à la Serbie (comme la France) et des secteurs de la gauche communiste qui voulait reconnaître en Milosevic l’héritier de Tito. Le Vatican et l’Allemagne réunifiée se sont reconnus  dans la part catholique (comme  l’est la majorité des Croates). Les pays musulmans se sont reconnus dans la partie musulmane. Ces identifications ne peuvent être définies comme ethniques, puisque ce n’est ni l’origine, ni la langue, ni les habitudes alimentaires ou quoi que ce soit d’autre pouvant définir une ethnie, qui divisaient les peuples en conflit, mais au contraire comme purement religieuses (3). La religion comme facteur aliénant et pivot d’un ‘conflit de civilisations’ imposé. La religion est imposée comme élément de  d’identité et de reconnaissance après le mensonge du communisme athée. La religion comme noyau de tout ce qui divise en groupes exclusifs et qui donne de nouvelles perspectives à la solitude des individus, la ‘vraie foi’ que chacun possède à utiliser comme arme de conquête, conversion ou d’absorption de l’autre, le ‘minoritaire’, l’incertain, l’infidèle à remette sur le droit chemin. Dans un climat d’incertitude économique, d’effondrement du pouvoir d’achat et de manque de ‘pères’ capable de prendre par la main les fils perdus (4), popes/prêtres/imams sont devenues des figures de référence et de tromperie ultérieure. La propagande nationaliste des nouvelles élites au gouvernement dans les différentes républiques  et la propagande religieuse dans les églises et les mosquées – à l’exception d’importantes îles d’intelligence individuelle – commencèrent à coïncider sur un mode toujours sans cesse plus précis et alarmant.

 

A Sarajevo, comme dans d’autres villes développées de culture antifasciste (5) et dans de nombreuses zones de la Bosnie Herzégovine, les séparations induites n’ont pas réussi à ouvrir une brèche : la cité est couramment qualifiée de ‘multiethnique’ et définie comme la ‘Jérusalem de l’Europe’, mais je crois qu’il est plus juste de la dire a-ethnique, en ce sens que la citoyenneté prévaut sur toute appartenance. Les signes de cette anti-ethnicité  (ou a-ethnicité) étaient, et sont en partie encore, les nombreux mariages mixtes, la fierté de la ‘raja’ (‘compagnie’ à laquelle appartiennent les vrais habitants de Sarajevo), le fait que tous participaient aux fêtes religieuses de tous*****, ainsi qu’aux fêtes laïques. Et ce cimetière dans le quartier de Bare, construit en 1965 comme un amphithéâtre étendu sur une colline, avec cinq « chapelles » sur la place centrale, respectivement pour les catholiques, les orthodoxes, les musulmans, les juifs et les autres (d’autres religions, ou encore athées), mais structurellement liées comme cinq amis, avec chacun les bras sur les épaules de l’autre. Sarajevo a réagi à la guerre qui avait éclaté dans le reste de la Yougoslavie avec peur et incrédulité, et avec au fond la certitude que jamais une chose comme ce qui est arrivé à Vukovar******, ne se serait passée en Bosnie-Herzégovine, Yougoslavie en miniature, terre de croisements. Les drapeaux de l’incrédulité, en même temps que les drapeaux yougoslaves et les portraits de Tito, ont été portés le 6 avril 1992 à une manifestation pacifiste, qui se trouva brusquement sous le feu de francs-tireurs serbo-bosniaques postés dans l’ancien cimetière juif. Deux jeunes filles périrent et ce fut le début du siège.

 

Cela n’a pas de sens de le parcourir à nouveau, mais seulement de préciser en quoi consiste le ‘scandale’ inécouté de Sarajevo. Le scandale se produit ou est produit par les circonstances historiques, sous l’effet de dynamiques internes et entièrement humaines, et bientôt déborde afin qu’une civilisation puisse l’affronter, le comprendre et le dépasser, grandissant grâce à lui et grâce à la défaite de ce qui l’a déterminé : nous ne sommes pas très loin de ce que Machiavel définissait comme une ‘occasion’. Sarajevo comme scandale/occasion pour l’Europe de pouvoir vraiment s’unifier, de choisir une voie pour sortir de l’assujettissement à la puissance militaire étasunienne et aux puissances économiques émergentes (le double assujettissement d’aujourd’hui, le rouleau-compresseur sino-étatsunien). Ceci ne s’est pas réalisé : loin d’avoir un minimum de vison commune, les différentes puissances européennes ont rivalisé pour protéger chacune ses propres fidèles, dans une optique mafieuse, allant jusqu’à remettre les clés de la résolution du conflit à l’intervention étatsunienne (1995, Clinton fait sortir les Etats-Unis de l’impasse isolationniste). Pour éviter toute équivoque : les solutions aux conflits doivent être pacifiques et la non violence peut être l’arme la plus efficace pour changer le cours de l’histoire. Mais que faire quand le fascisme avance, qu’il capture les esprits et les hommes, pratique la politique de la terre brûlée, viole et déplace les populations.  Mais que faire quand la ville antiethnique par excellence est soumise à un siège médiéval et hypermoderne, quand les francs-tireurs font feu sur des hommes et des femmes  qui font la queue près d’une fontaine pour y prendre l’eau que les agresseurs avaient enlevée des robinets, quand les obsèques des morts de la veille deviennent des cibles ? La non-violence ne peut que s’armer. Si elle devenait absolue, elle deviendrait l’une des tromperies idéologiques dont nous subirions les assauts. L’Union européenne et ses mille visages, e l4ONU, sont mortes ensemble à Sarajevo, dans l’indécision ou en prenant des décisions précipitées, dans l’incapacité qu’elles étaient de comprendre, ou au contraire en en ayant compris trop (que la Yougoslavie serait tombée dans les mains des capitales occidentales sans trop d dommages, en particulier). C’est là aussi qu’est morte une partie de notre extrême-gauche, passée à toute vitesse de slogans comme ‘jamais plus sans fusil’ à l’éloge de l’embargo des armes  pour toutes les armées combattantes, obtenant ainsi que qui avait ces armes les utilisait, donc, contre qui en était dépourvu. Ecrasés entre un angélisme lumineux et des visions sombres de l’histoire (un peu à la Cioran dans Histoire et utopie), nous n’avons réussi ni à être bons ni à utiliser, ou au moins à suggérer, la juste violence : nous l’avons seulement déléguée et regarder devenir moins juste (6). Dans les interprétations qui reviennent, on passe de l’apologie du recours à la guerre toujours et quoiqu’il en soit (la doctrine Clinton/Bush, criminelle) à un quiétisme de quatre sous incapable de tout sursaut politique. Quant à cette seconde attitude se rallient des thèses destinées à mettre le doigt sur la ‘violence des agressés’, les choses ne changent pas : c’est la ‘violence des victimes’ qui vient créer un problème, ou plutôt la ‘transformation des victimes en combattants’, qui ne laisse plus la possibilité de porter secours avec miséricorde mais qui met en face du choix tragique de la participation. Prenez la peine de lire quelques reconstructions de ce qui s’est passé à Srebrenica (7) et vous trouverez des justifications, distinguos, et l’escroquerie suprême : tous ont souffert durant cette guerre ! Une vérité fausse : s’il est vrai que cette guerre a été ‘une guerre contre tous les civils (une fillette serbe n’a pas moins souffert qu’une croate, qu’une musulmane ou qu’une juive…), user  cette donnée politiquement  pour justifier les inventeurs/acteurs principaux du crime, est malhonnête. Essayez de soutenir cette thèse, et les accusations d’islamophilie etc.  pleuvront (venant de gauche, mais de ‘paraléghistes’ [proches de la Ligue lombarde NdT.] et bushistes, au fond). Pour sortir de ce bourbier, je propose un changement de paramètres basé sur la nécessaire distinction entre un leader et sa clique, d’un côté, et son peuple de l’autre (inoubliable leçon de Bruno Morandi), en temps de guerre comme en temps de paix, en démocratie come sous une dictature. Ceci empêcherait de toucher le peuple à la manière terroriste pour atteindre ses leaders, et aussi d’éviter d’user de généralisations du type ‘les Serbes ont tué/exterminé, etc.’, à la place d’une formule plus juste comme ‘les fascistes serbes… ou croates, ou musulmans, etc.’. Ce changement de paramètres serait aussi basé sur la discriminante anti-fasciste comme méthode de lecture de toute situation, en particulier de l’éternel et bien installé fascisme de dieu/patrie/famille à ‘défendre’ contre les ennemis internes et externes, le plus souvent créés pour la circonstance. Milosevic n’a jamais été un combattant anti-impérialiste, mais un socialnationaliste, principal coupable (je personnalise pour abréger) du désastre yougoslave et de l’épouvantable crise de tous ces peuples, aidé par son digne comparse croate Tudman, et par les extrémistes islamistes (il y en avait et il en aura toujours davantage, non pas come cause mais comme conséquence du conflit en Bosnie-Herzégovine, et des autres conflits planétaires) (8), dans un contexte européen et mondial qui a fait de la guerre l’unique ‘moyen de résoudre les controverses internationales’, vraie raison d’être de la politique.

 

Le scandale de la guerre en Bosnie-Herzégovine parle de notre barbarie ordinaire. Une jeune et belle artiste bosniaque, Sejla Kameric, a tapissé les murs de Sarajevo de son image sur laquelle étaient retranscrites les paroles qu’un ‘casque bleu’ hollandais  avait graffitées sur le mur de sa caserne près de Srebrenica : ‘Edentée ? Moustachue ? Et quelle odeur de merde ? C’est une jeune fille bosniaque…’. Dans ce mépris, on trouve toute l’horreur (purement européenne, de notre ‘civilisation supérieure’) de cette guerre. De cette horreur, il convient d’en faire les comptes, de commencer à la penser. Comme ont fait et continuent à le faire les femmes, otrthodoxes et musumlmanes, de la ‘Coopérative Ensemble’ de Bratunac, près de Srebrenica : production et commercialisation de fruits ds bois et de leurs dérivés (confitures, sirops), assemblées pour comprendre et décider, dépassement dans les faits de la haine accumulée dans les années passées, et cette ‘amnistie sans amnésie’ qu’Adam Michnik avait fait appliquer dans la Pologne post-communiste, avant l’arrivée au pouvoir des frères Kaczinsky. Mais je ne crois pas que les solutions peuvent arriver seulement de la base, parce que le sommet décide et détermine le destin des nations et des peuples. Le sommet en Bosnie-Herzégovine est aujourd’hui occupé par les polémiques entre les leaders politiques  des deux entités (9) sur la réforme de la police (dans l’intention de l’unifier), sur la gestion de la mémoire (en particulier depuis la sentence du 26 février 2007 de la Cour de Justice Internationale, qui disculpe la Serbie et fait retomber la responsabilité, entre autres du massacre de Srebrenica, sur l’armée de la République serbe de Bosnie-Herzégovine) et sur d’autres dossiers encore. Les paries concernées se définissent sur des bases communautaires et ethniques. Ce sont en effet les partis nationalistes ‘modérés ‘ qui ont vaincu la tornade électorale d’octobre 206 : des politiciens de très bas niveau mais très rusés et responsables principaux de l’impasse politique et économique actuelle du pays. A ces ‘politiciens’, guidés de temps en temps par un Haut Représentant des Nations Unies (10) – ce qui fait de la Bosnie-Herzégovine un protectorat -, est échue la tâche de renforcer l’Etat dans cette phase délicate. Leurs intentions étant de répondre aux intérêts économiques des groupes respectifs qui les ont élus, il n’y a pas grand-chose à espérer. Une auto-organisation bien articulée des citoyens, le renforcement des organismes intermédiaires, du monde du travail et de la culture, permettra au pays de commencer à sortir du marrais dans lequel il se trouve encore, douze ans après la fin de la guerre. Et si dans la région les mèches Kosovo et Bosnie–Herzégovine n’étaient pas encore allumées (nombreux sont ceux qui se demandent si  « ce pays existera encore dans vingt ou trente ans »), une forte intégration économique des Balkans occidentaux dans une Europe capable de raisonner et d’agir politiquement, pourrait être la voie pour sortir de l’effondrement actuel de tout un peuple qui ne le mérite pas, pas plus qu’il ne mérite la stupidité et le fanatisme de la politique de ce début de troisième millénaire, tellement semblable à celle du siècle que nous venons de quitter. Imposer à nouveau la question politique plutôt que la question ‘ethnique’ serait une conquête valable pour les Balkans et pour nous tous.

Gianluca Paciucci (Genova)

Paru dans Guerre&Pace, Milan, octobre 2007

http://www.mercatiesplosivi.com/guerrepace/index.html

*Les foibe sont des gouffres karstiques du Nord-Est de l’Italie, où les partisans de Tito assassinèrent des Italiens  à la fin de la Deuxième guerre mondiale

**Traduction littérale. En italien, « corre buon sangue » est une métaphore qui exprime la bonne entente entre des personnes : on pourrait dire que certains, dans ce contexte, sont ‘copains comme cochons ‘. Nous serions toutefois tentés de traduire ‘sauvagement’ qu’il y a en tout cas du mauvais sang à se faire…

*** Novi Ligure, fait divers  particulièrement horrible survenu en 2001

http://www.repubblica.it/2004/k/sezioni/cronaca/noviomar/noviomar/noviomar.html ; Erba, autre fait divers épouvantable remontant à janvier 2007

http://www.repubblica.it/2007/01/sezioni/cronaca/erba-2/erba-2/erba-2.html

**** Au début de 2004 ont été commis des actes de torture, des viols et des meurtres contre des prisonniers à la prison d’Abou Ghraïb en Iraq, par des agents de la 372ème compagnie de Police militaire des Etats-Unis.

http://en.wikipedia.org/wiki/Abu_Ghraib_prisoner_abuse

Fallujah : la deuxième bataille de Fallujah, menée par les Américains et les forces de sécurité irakiennes contre les insurgés irakiens du 7 novembre au 23 décembre 2004, a été (de source américaine) le plus lourd combat en zone urbaine depuis  la bataille de Hué au Vietnam. http://en.wikipedia.org/wiki/Second_Battle_of_Fallujah

***** Au risque de fâcher, rappelons que cette

 


participation croisée n’était pas exceptionnelle dans

l’Algérie d’avant l’indépendance. Le dire n’est en

rien un plaidoyer pour le colonialisme.

 

 


****** La ville croate de Vukovar est entièrement

détruite en novembre 1991 après trois mois de siège par l’armée serbe.

http://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_de_Vukovar

Traduction et notes en français : Jean Yves Feberey

 

LO SCANDALO SARAJEVO

 

“...Purtroppo ho il timore di non essere capace di spiegare in modo obiettivo, e non di parte, a un comune lettore straniero perché qui si stia facendo la guerra. Probabilmente si fa come tutte le altre guerre per la conquista dei territori e per i saccheggi. Ma perché stiano bombardando una città di mezzo milione di abitanti dalla mattina alla sera dalle montagne vicine, a questa domanda non ho nessun 'probabilmente'...”

(da Nenad Veličković, Il diario di Maja, Roma, Editori Riuniti, 1995).

 

Chiedo scusa se vi parlo di Sarajevo, è il titolo dell’edizione italiana di una raccolta di saggi di Marko Vešović, intellettuale di origini montenegrine, resistente contro i fascisti serbo-bosniaci durante l’assedio della capitale della Bosnia Erzegovina (1992–1995). Chiedo scusa anch’io, perché torno a parlarne convinto che lì si sia giocata una partita decisiva, e ignorata, delle nostra storia recente.

   Sarajevo, uno dei cuori vivi d’Europa, subì un assedio feroce, il più lungo della storia del Novecento (1325 giorni, più di quello portato a San Leningrado), nell’Europa del dopo ’89 segnata dal crollo del ‘socialismo reale’; dallo sforzo statunitense (riuscito) di evitare la saldatura Unione Europea – Russia; da rapidissime e violente transizioni al capitalismo; e dalle conseguenti rinascite di fantasmi che si credevano sepolti (nazionalismi/fedi cieche e alienanti/riscoperta di ‘radici’ rabbiose e, spesso, inventate) e che invece, alimentati dalla crisi economica, sono prepotentemente

risorti. Tito aveva tentato di nascondere le differenze tra i popoli nella sua Jugoslavia sotto lo slogan volontaristico ‘unità e fratellanza’, con parziale successo durante gli anni del suo potere risoltosi però nell’orrore degli anni Novanta, per contrapasso. La morte di Tito fu la morte di un padre e quella di un progetto imponente, che poco ebbe a che vedere con i crimini degli altri regimi ‘socialisti’. Se ancora oggi, a Sarajevo come altrove nelle terre della ex Jugoslavia, le persone perbene (vecchi e giovani) portano fiori alle statue del Maresciallo vuol dire che qualcosa di buono era accaduto dal 1945 al 1980: non semplici nostalgie (una 'jugonostalgia' pure esiste), ma riconoscimento politico. Tanto per capirci: se i gerarchi di Tito sono pressoché tutti diventati nazionalisti accaniti nelle nuove nazioni nate, sono gli uomini e le donne del progetto titoista a non dimenticare.

   Dalla ‘fiamma olimpica’ del 1984, alla ‘Sarajevo in fiamme’ del 1992, suggerisce efficacemente Enver Hadžihomerspahić, intellettuale sarajevese: è così, in otto anni si consuma il dramma del Paese degli slavi del sud, dalla splendida città olimpica (“la più bella città del mondo”, nel 1984, dicono i bosniaci) al luogo della morte oscena per fame, per sete, per freddo, e per la stupida infallibilità dei cecchini. L’Europa in difficoltà e l’O.N.U., già in crisi per la Prima guerra del Golfo Persico, non riescono a interpretare il conflitto esploso, e lo leggono come uno dei tanti conflitti ‘etnici’ scoppiati dopo la fine della guerra fredda (1). Se Walter Benjamin denunciava l’ “estetizzazione della politica” operata dai fascismi (da Marinetti in poi), a noi tocca sottolineare un altro fenomeno: l’ etnicizzazione della politica, fatto marcante della fase storica in cui siamo, in ogni parte del pianeta. Dagli anni Ottanta a oggi sono state avviate ricerche di radici e di genealogie, creati migliaia di riti (l’ampolla con le acque del dio Po portata dalle sorgenti al delta è un’ideuzza tra le altre, come le altre sconcertante – ma non sanzionata col ridicolo, purtroppo). Identità diventa parola–chiave nella bocca di genti disperse di cui nessuno parlerà, come in quella dei potenti che, dopo aver generato sconcerto e insicurezza con le loro pratiche iperliberiste e precarizzanti, offrono le soluzioni rovinose dell'appartenenza comunitaria e dei legami di sangue, spazzando via secoli di riflessioni universaliste/internazionaliste e promuovendo il 'riconoscimento del proprio simile' come via alla salvezza (i toni dominanti sono quelli 'religiosi'). Tra le guerre per bande nei quartieri 'difficili' e la scelta di Sarkozy di creare un 'Ministero dell'immigrazione, dell'integrazione, dell'identità nazionale e dello sviluppo comune' corre buon sangue. I media fanno il resto: se un pirata della strada o un assassino è di origini straniere, la stigmatizzazione è immediata, con i tremendi casi limite di Novi e di Erba, e quello inverso del muratore bosniaco Dragan Cigan, annegato nel Piave il 22 luglio dopo aver tratto in salvo due bambini (“...l'eroismo non conosce barriere etniche...”, è stato detto, ovvero persino un bosniaco può compiere atti nobili; e gli eroi, ma non gli uomini, son tutti uguali...).

   Interno a questa vicenda, ma più complesso, è il caso jugoslavo: popoli diversi si erano venuti a trovare sotto il manto protettivo di Tito che, da buon 'asburgico' qual era, promosse un'ideologia capace di far sentire jugoslavi i serbi, i croati, gli sloveni e i Musulmani, oltre agli albanesi del Kosovo, agli ungheresi della Vojvodina, agli italiani dell'Istria etc. - in questa sede è impossibile affrontare compiutamente questo tema (confini orientali dell'Italia, fascismo e foibe), su cui si potrà tornare. Ma qualcosa covava sotto la cenere e così se il '68 cecoslovacco fu una 'primavera' socialista e libertaria (sintonia tra un gruppo dirigente e il suo popolo) quello jugoslavo, che vide anche un dissenso marxista e internazionalista, minoritario e presto messo a tacere, si colorò soprattutto di tinte nazionaliste: ad esempio la cosiddetta 'primavera di Zagabria' del 1971 fu un primo forte movimento in questo senso, anticipata e seguita da rivendicazioni di parte dei musulmani e degli albanesi del Kosovo, e da un sentimento generale di disagio. La Costituzione del 1974, che concedeva ampie autonomie alle repubbliche e ai popoli, fu il prodotto di questa fase e stabilizzò la situazione fino alla morte di Tito.

 

   Fu il 1989 a causare i più importanti cambiamenti a livello statuale avvenuti in Europa dal 1945: unificazioni a ovest (rafforzamento dell'Unione Europea -almeno dal punto di vista territoriale, con la graduale e decisa progressione verso est, ed economico-, riunificazione tedesca), dissoluzioni a est (pacifiche -Cechia e Slovacchia- e violente -dissoluzione dell'URSS -nel Caucaso- e della Jugoslavia). Nei Balcani, e non certo per primitivismo o per ferocia naturale di quei popoli, gli anni Novanta furono attraversati da conflitti ad alta intensità: le élite politiche uscite dal comunismo investirono il loro capitale politico nelle sciagurate imprese nazionaliste col solo scopo di mantenersi al potere e di riuscire a gestire le transizioni al capitalismo. Queste 'transizioni' avrebbero potuto portare enormi profitti a  gruppi di oligarchi (come è successo in Polonia e in Russia) a danno dei popoli, almeno per tutta la lunga fase di accumulazione, ancora oggi in corso (diminuzione drastica della 'speranza di vita', ad esempio, in Russia). Fu così che due 'guerre contro i popoli' vennero pianificate: una politica (sotto forma di guerre 'civili') e una economica (liberismo selvaggio), entrambe figlie del Novecento più puro, del Novecento europeo e occidentale. Se per Pavese ogni guerra è una guerra civile, oggi sappiamo che ogni guerra è guerra 'contro' i civili: la linea che va da Guernica a Londra a Dresda a Hiroshima al Vietnam alle 'due torri' all'Afghanistan -bombe sovietiche prima e NATO oggi- e all'Iraq Libano Darfur (terrorizzare i popoli perché i tiranni cadano o perché sia garantita la 'libera' circolazione delle materie prime), è ancora quella denunciata da Gunther Anders, è guerra dall'alto, anonima, che non può “vedere negli occhi un uomo che muore”, senza nemmeno più il bisogno, oggi, di un pilota nei bombardieri telecomandati; e poi deportazioni di popoli, campi di concentramento, stupri di guerra (non stupri etnici ma ginocidio); trionfo dello sniper e della marmaglia/soldataglia autorizzata al crimine in una strada dell'ex Jugoslavia come ad Abu Graib o a Falluja, difesa e poi fatta santa subito dai rispettivi governi nella retorica degli eroi e dei martiri, e dell'esportazione della democrazia. Questo è accaduto nei Balcani: non lotte tra barbari, ma trionfo delle due modernizzazioni novecentesche, bellica e capitalistica, avvenute in ritardo rispetto ad altri Paesi europei a causa dell'utilissima 'pausa/tregua' del socialismo reale che ha trasformato milioni di contadini dell'est in una classe operaia e burocratica  pronta ora a servire il dio unico del capitale. Ha ragione Toni Negri quando dice di non capire perché l'occidente ce l'abbia tanto con Stalin e compagnia bella, quando invece dovrebbe essergli grato per la rapidissima inclusione di interi popoli nel Novecento industrialista e fordista, spazzata via l'arretratezza contadina, e ora braccia disciplinate a basso costo nel paradiso postfordista (2).

 

   A questo punto dell'analisi interviene lo scandalo, nel senso letterale di 'pietra d'inciampo', di Sarajevo, uno scandalo che è stato aggirato e che ancora oggi non riesce a produrre pensiero e riflessione, ma solo azioni paludose e ulteriori impedimenti. Per le ragioni che ho più sopra citato, le guerre jugoslave non sono state lette in modo critico e ciò ha provocato l'etnicizzazione delle interpretazioni del conflitto, con le conseguenti 'scelte di parte' dei rispettivi padrini: la grande madre Russia si è riconosciuta nella parte ortodossa (la maggior parte dei serbi lo è) insieme a potenze storicamente legate alla Serbia (come la Francia) e a settori della sinistra comunista che in Milošević volle riconoscere l'erede di Tito; il Vaticano e la Germania riunificata si riconobbero nella parte cattolica (la maggior parte dei croati lo è); i Paesi musulmani si riconobbero nella parte islamica. Queste identificazioni non possono essere definite 'etniche', in quanto né l'origine né la lingua né i cibi o quant'altro possa definire un'etnia dividevano i popoli in conflitto, ma prettamente 'religiose' (3).  Religione come fattore alienante e cardine di un imposto 'scontro di civiltà'; religione imposta come elemento di identità e di riconoscimento -dopo le falsità del comunismo ateo-; religione come nucleo di tutto ciò che divide in gruppi esclusivi e che dà prospettive altre alla solitudine degli individui, la 'vera fede' che ognuno possiede da utilizzare come arma di conquista, conversione o assorbimento dell'altro, il 'minorato', l'insicuro, l'infedele da riportare sulla retta via. In un clima di incertezza economica, di crollo del potere di acquisto e di mancanza di 'padri' capaci di condurre per mano i figli smarriti (4), pope/preti/imam sono diventate figure di riferimento e di ulteriore inganno. La propaganda nazionalista delle nuove élite al governo nelle varie repubbliche e quella religiosa in chiese e moschee -fatte salve singole importanti isole di intelligenza- cominciarono a coincidere in modo sempre più preciso e allarmante.

   A Sarajevo, come in altre città sviluppate di cultura antifascista (5) e in non poche zone della Bosnia Erzegovina, le separazioni indotte non riuscirono a far breccia: la città viene comunemente detta 'multietnica' e definita la 'Gerusalemme d'Europa', ma credo sia più giusto dirla 'antietnica', nel senso che la cittadinanza prevaleva su qualsiasi appartenenza. Segnali di questa antietnicità (o aetnicità) erano, e in parte ancora sono, i numerosissimi matrimoni misti, l'orgoglio della 'raja' ('compagnia', cui appartengono i veri sarajevesi), il fatto che tutti partecipavano alle feste religiose di tutti e a quelle laiche; e quel cimitero nel quartiere di Bare, costruito nel 1965 ad anfiteatro adagiato su una collina, con nella piazza centrale cinque cappelle rispettivamente per i cattolici, gli ortodossi, gli islamici, gli ebrei e gli 'altri' (di altre fedi, oppure atei), ma strutturalmente legate come cinque amici, ognuno con le braccia sulle spalle dell’altro. Sarajevo reagì alla guerra scoppiata nel resto della Jugoslavia con paura e con incredulità, e in fondo con la certezza che mai una cosa come quelle successe a Vukovar sarebbe accaduta in Bosnia-Erzegovina, Jugoslavia in scala ridotta, terra d'intrecci. Le bandiere dell'incredulità, insieme a quelle jugoslave e a ritratti di Tito, vennero portate il 6 aprile del 1992 in una manifestazione pacifista, improvvisamente sottoposta al tiro di cecchini serbo-bosniaci appostati nell'antico cimitero ebraico. Due ragazze morte, e l'inizio dell'assedio.

   Non ha senso qui ripercorrerlo, ma solo precisare in cosa consista l'inascoltato 'scandalo' di Sarajevo. Lo scandalo si produce nelle o ci viene dato dalle circostanze storiche, per dinamiche interne e interamente umane, e presto deborda affinché una civiltà possa affrontarlo, coglierlo e andare oltre, crescendo grazie ad esso e grazie alla sconfitta di ciò che lo ha determinato: non siamo lontani da quella che Machiavelli definiva 'occasione'. Sarajevo come scandalo/occasione per l'Europa, per potersi veramente unificare, per poter scegliere una via d'uscita all'assoggettamento alla potenza militare statunitense e a quelle economiche nascenti (il doppio assoggettamento dell'oggi, lo schiacciasassi sino-statunitense). Questo non accadde: lungi dall'avere un minimo di visione comune, le varie potenze europee gareggiarono a proteggere ciascuna i propri fedeli, in un'ottica mafiosa, fino a consegnare le chiavi della risoluzione del conflitto all'intervento armato statunitense (1995, Clinton fa uscire gli USA dall'impasse isolazionista). Per evitare qualsiasi equivoco: le soluzioni dei conflitti devono essere pacifiche e la non violenza può essere l'arma più efficace per cambiare il volto della storia. Ma cosa fare quando il fascismo avanza, cattura teste e uomini, fa terra bruciata, stupra e sposta popolazioni; ma cosa fare quando la città antietnica per eccellenza viene sottoposta a un assedio medievale e ipermoderno, quando cecchini sparano su uomini e donne in fila a una fontana per prendere l'acqua che gli aggressori avevano preventivamente tolto dai rubinetti, quando vengono centrati funerali dei morti del giorno prima? La non violenza non può che armarsi. Se essa si facesse assoluta, diverrebbe uno dei tanti inganni ideologici da cui subire assalti. L'Unione Europea e i suoi mille volti, e l'ONU, morirono entrambe a Sarajevo, nell'indecisione o nelle decisioni affrettate, nell'incapacità di comprendere o nell'aver capito troppo (che la Jugoslavia sarebbe caduta nelle mani del capitale occidentale senza troppi danni, in particolare), e lì morì parte della nostra sinistra estrema passata in fretta da slogan come 'mai più senza fucile' all'elogio dell'embargo delle armi per tutti gli eserciti combattenti, così ottenendo che chi quelle armi aveva le utilizzava, eccome, contro chi ne era sprovvisto. Schiacciati tra luminoso angelismo e visioni cupe della storia (un po' alla Cioran in Storia e utopia), non siamo riusciti né ad essere buoni né a usare, o almeno a suggerire, la giusta violenza: solo l'abbiamo delegata e guardata diventare meno giusta (6). Nelle interpretazioni che ricorrono si passa dall'apologia del ricorso alla guerra sempre e comunque (la dottrina Clinton/Bush, criminale) a un quietismo da quattro soldi incapace di un qualsiasi guizzo politico.

Quando a questo secondo atteggiamento si uniscono tesi volte a puntare il dito sulla 'violenza degli aggrediti', le cose proprio non tornano: a dare fastidio è la 'violenza delle vittime', o meglio la 'trasformazione delle vittime in combattenti', che non offre più la possibilità di soccorrere con misericordia ma che pone davanti alla scelta tragica della partecipazione. Leggetevi inoltre qualche ricostruzione di ciò che accadde a Srebrenica (7) e troverete giustificazionismi, distinguo, e la truffa suprema: tutti hanno sofferto in quella guerra! Una falsa verità: perché se è vero che questa è stata una 'guerra contro tutti i civili' (una bambina serba non ha sofferto meno di una croata o musulmana o ebrea...), usare questo dato politicamente per giustificare gli ideatori/realizzatori principali del crimine è disonesto. Provate a sostenere questa tesi, e giù accuse (da sinistra, ma paraleghiste e bushiane, in fondo) di filoislamismo, etc.  Per uscire da questo fango, propongo un cambio di parametri basato sulla necessaria distinzione tra un leader e la sua cricca, da un lato, e il suo popolo dall’altro (indimenticata lezione di Bruno Morandi), in guerra come in pace, in democrazia come in dittatura: questo impedirebbe di colpire terroristicamente il popolo per colpire i suoi leader, e di usare generalizzazioni del tipo 'i serbi hanno ucciso/sterminato, etc.', al posto di un più giusto 'i fascisti serbi...o quelli croati, musulmani, etc.'; e sulla introduzione della discriminante antifascista come metodo di lettura di ogni situazione, l’eterno e ben insediato fascismo di dio/patria/famiglia da ‘difendere’ contro i nemici esterni e interni, il più delle volte creati ad arte. Milošević non è mai stato un combattente anti-imperialista, ma un socialnazionalista, principale colpevole (personalizzo per brevità) del disastro jugoslavo e della spaventosa crisi di tutti quei popoli, aiutato dal suo degno compare croato Tuđman, e dagli estremisti islamici (ce n'erano e ce ne saranno sempre di più, non come causa ma come conseguenza del conflitto in Bosnia-Erzegovina, e degli altri conflitti planetari) (8), in un contesto europeo e planetario che ha fatto della guerra l'unico 'mezzo di risoluzione delle controversie internazionali', vera ragione della politica.

Della nostra comune barbarie, parla lo scandalo della guerra in Bosnia-Erzegovina. Una giovane e bella artista bosniaca, Šejla Kamerić, tappezzò i muri di Sarajevo con la sua immagine con sopra riportate le parole che uno dei 'caschi blu' olandesi graffiò su una parete della sua caserma nei pressi di Srebrenica: 'sdentata?, baffuta?, e che puzza di merda? E' una ragazza bosniaca...'. In questo disprezzo tutto l'orrore (tutto europeo, della nostra 'civiltà superiore') di quella guerra. Con questo orrore occorre cominciare a fare i conti, occorre cominciare a pensarlo. Come hanno fatto e stanno facendo le donne, ortodosse e musulmane, della 'Cooperativa Insieme' di Bratunac, vicino a Srebrenica: produzione e commercializzazione di frutti di bosco e derivati (marmellate, sciroppi), assemblee per capire   e per decidere, superamento nei fatti dell'odio accumulato negli anni passati, e quell' 'amnistia senza amnesia' che Adam Michnik fece applicare nella Polonia postcomunista e prima dell'avvento dei gemelli Kaczinsky. Ma non credo che solo dal basso possano arrivare le soluzioni, perché l'alto decide e determina i destini delle nazioni e dei popoli. L'alto in Bosnia-Erzegovina è oggi occupato dalle polemiche tra i leader politici delle due entità (9) sulla riforma della polizia (nel tentativo di unificarla), sulla gestione della memoria (in particolare dopo la sentenza del 26 febbraio 2007 emessa dalla Corte Internazionale di Giustizia che scagiona la Serbia e fa cadere la responsabilità, tra l'altro del massacro di Srebrenica, sull'esercito della Repubblica serba di Bosnia-Erzegovina) e su altri dossier. Le parti in gioco si definiscono su base comunitaria e etnica, essendo stati i partiti nazionalisti 'moderati' (termine tra i più inutili oggi in uso) ad aver vinto la tornata elettorale dell'ottobre 2006: politici di bassissimo livello ma di acuta scaltrezza, e principali responsabili dell'attuale impasse politica ed economica del Paese. A questi 'politici', di tanto in tanto bacchettati dall'Alto Rappresentante delle Nazioni Unite (10) -figura che fa della Bosnia-Erzegovina un protettorato-, è  affidato il compito di rafforzare lo Stato, in questa fase delicata. Essendo però i loro intenti quelli di rispondere agli interessi economici dei rispettivi blocchi che li hanno votati, non c'è da sperare molto. Un’articolata auto-organizzazione dei cittadini, il rafforzamento degli organismi intermedi, del mondo del lavoro e della cultura, potrà permettere al Paese di cominciare ad uscire dalla palude in cui è ancora, dodici anni dopo la fine della guerra. E se nell'area non fossero ancora accese le micce Kosovo e Bosnia-Erzegovina (“Esisterà questo Paese tra venti o trent’anni?”, si chiedono in molti), una forte integrazione economico-turistica di tutti i Balcani occidentali, in un'Europa capace di ragionare e di agire politicamente, e non solo di imporre attacchi allo stato sociale, potrebbero essere le vie d'uscita dall'attuale sfascio di tutte le membra di un popolo che non lo merita, che non merita l'insipienza e il fanatismo della politica di inizio terzo millennio, così simile a quella del secolo appena lasciato. Reimporre la 'questione sociale' a scapito di quella 'etnica' sarebbe una conquista valida per i Balcani e per tutti noi.

 

Gianluca Paciucci (Genova)

Guerre&Pace, Milano, ottobre 2007

(1)   A questo proposito hanno scritto importanti articoli William Bonapace (“I Balcani dopo la tempesta. Guerre, miseria e globalizzazione nel Sud-Est europeo”, Giano, n. 45, dicembre 2003), Claudio Marta (“ Jugoslavia: per un ripensamento critico. Paradigmi della etnicizzazione e interpretazioni capziose delle guerre ”, Giano, n. 51, novembre 2005) e Zaira Tiziana Lofranco (“ Bosnia-Erzegovina 1992-1995: analisi d'un conflitto 'etnico' e d'un intervento 'umanitario' ”, ib.).

(2)   In Negri, Antonio, Goodbye, Mr. Socialism, Milano, Feltrinelli, 2006.

(3)   Qui la storia fa un salto indietro di secoli, e ci riporta all'Europa delle guerre di religione che si conclusero nella costatazione dell'impossibilità dell'eliminazione totale di uno dei contendenti e nell'invenzione della tolleranza (una linea che trionfa nello Spinoza celebrante la sua Amsterdam del Seicento, trionfo dei traffici intercomunitari e della 'neutralità' del denaro) e nell'esportazione del proprio modello nel resto del pianeta, in cambio di ricchezze razziate.

(4)   La mancanza di autonomia politica dei cittadini jugoslavi e le forti differenze tra campagne (isolate e inaccessibili, in un Paese vasto e poco antropizzato, dotato di una rete viaria insufficiente) e città (sviluppate e governate da élite universaliste) sono tra i principali errori da attribuire a Tito e al suo regime.

(5)   Come Tuzla, la prima città europea liberatasi dal nazifascismo, nell'ottobre del 1943, e che mai ha avuto leader nazionalisti, anche nei momenti peggiori del conflitto in Bosnia-Erzegovina. Quando una granata terroristica serbo-bosniaca uccise 71 giovani nel maggio del 1995, la reazione non fu di odio 'etnico' ma di denuncia del fascismo e del militarismo: nella lapide che ricorda il massacro, l'accusa è rivolta contro i 'fascisti serbo-bosniaci' e non contro il popolo serbo nella sua totalità. Diverso il caso di città come Mostar nell'Erzegovina, separata da un conflitto tra cattolici e musulmani, e Banja Luka, ora capoluogo della Repubblica Serba di Bosnia Erzegovina, feudo di nazionalisti.

(6)   Questo non nega il lavoro straordinario svolto da centinaia e centinaia di pacifisti, prima, durante e dopo la guerra, lavoro umanitario e di sostegno alla società civile. Il fallimento del pacifismo è 'politico', nel mondo così com’è. In tutti gli altri campi esso ha avuto ragione.

(7)   Ad esempio Johnstone, Diana, “Srebrenica: usare la guerra per fare più guerra”, Giano, n. 53, luglio 2006, articolo assai vago nei riferimenti: “un'indagine dimostrerebbe”: un'indagine?, pubblicata e reperibile dove?, condotta da chi?; “fondamentalisti islamici” presenti in Bosnia: quanti?, impegnati su quali fronti?; negazionismo, nei fatti, dei campi di concentramento; etc.. Insomma: l'incapacità solita di una lettura di carattere antifascista e antinazionalista, e in fin dei conti la tesi che 'tutti' si sono comportati malissimo in guerra e che i fascisti serbi hanno solo esagerato un po' (a Srebrenica, a Sarajevo, a Goražde, etc.). Peraltro il 68% dei morti della guerra in Bosnia-Erzegovina è di Musulmani (sono i dati più recenti –giugno 2007-, forniti dal 'Centro Ricerche e Documentazione' di Sarajevo), su 98.000 vittime ‘dirette’ accertate (tra cui più di 13.000 dispersi). Le vittime ‘indirette’, per cattiva alimentazione, malattie, stress, etc., e i mutilati, sono incommensurabili, ma pesano come macigni, nel conto finale. Per una lettura che reputo corretta dei fatti v. Sarajevo, mon amour, Roma, Infinito edizioni, 2007 (ed. originale Paris, Bucher Chastel, 2004 – l’edizione italiana è accresciuta e aggiornata), lunga intervista al generale Jovan Divjak, serbo-bosniaco, schieratosi da antifascista (famiglia partigiana, guardia del corpo di Tito, etc.) per Sarajevo. Importanti tutti gli scritti dedicati ai Balcani da Catherine Samary e da Antonio Moscato (su “Le Monde diplomatique” la prima, su “Bandiera rossa”, “Liberazione” e “Guerre&pace” il secondo) e quelli in ambito etno-antropologico di Annamaria Rivera (in particolare v. L’imbroglio etnico, Bari, Dedalo, 1997 e 2001, a cura di Gallisot-Kilani-Rivera).

(8)   Durante una manifestazione pacifista svoltasi a Sarajevo nel marzo del 2003 in occasione della Seconda Guerra del Golfo, si potevano leggere vari cartelli tra i quali “A Bassora si replica Srebrenica”.

(9)   Lo Stato indipendente di Bosnia-Erzegovina è composto dalla Federazione croato-musulmana e dalla Repubblica serba, più il distretto autonomo di Brćko. Tale struttura, incerta e instabile, è il frutto degli accordi di Dayton, che misero fine alla guerra ma che consegnarono il Paese a una pace fragile.

(10)                      Il nuovo Alto Rappresentante, lo slovacco Miroslav Lajcak, si muove con più capacità nell'attuale situazione, anche grazie alla conoscenza della lingua locale.

  


 

Nous remercions très vivement Gianluca Paciucci de nous avoir confié pour publication ce texte très riche et qui nous impose en tout cas de ne pas démissionner ni en ce qui concerne notre réflexion sur la guerre et les fanatismes, ni bien sûr en ce qui concerne l’Europe en marche. Nous voudrions ajouter en conclusion le titre d’un beau  film de et sur l’ex-Yougoslavie, fugitivement sorti en France en 1986 ou 1987, et qu’on ne trouve que très difficilement en DVD sur internet mais au format etatsunien : il s’agit de Hey Babu Riba de Jovan Acin. L’action se passe en 1953… Yougonostalgiques ne surtout pas s’abstenir.

 

Performance aux Pays-Bas, visible sur le net…

 

Toujours au chapitre inépuisable de la confrontation entre les trois grands monothéismes, voici le lien vers une performance de Joseph Semah (Amsterdam), Read full text. L’artiste y renvoie un peu, par un spectaculaire effet de mise en scène, les protagonistes dos-à-dos. Mais cette expression n’existe pas en néerlandais. Donc, voyez de vos yeux et entendez de vos oreilles…

http://nl.youtube.com/watch?v=NY8Nt9RSbyY

 

 

Un poème et une œuvre peinte de Miguel Garcia

 

El duende del amor…

 

            En marchant…

 

 

Andalousie –

Des chemins qui rêvent,

Marcher vers le soleil –

Dans l’intérieur des terres ;

Des ombres dansent au tempo

D’un cantante andalou –

 

1967 essais nucléaires des U.S.A. –

des buissons de désert.

Des haras fatigués

Des animaux qui aiment.

 

Vers le mystique

L’énergie flamenca au pur originel.

Un orage violent ;

Des voix brisent le silence

L’astre solaire –

La quête de l’eau –

Fêtes chrétiennes et maures,

Des cactus sauvages qui marchent unis –

 

L’humilité,

La quête de l’amour

Plante grasse

faiseuse de vie

la vie te répond –

 

Mon chemin sans retour.

 

 

                                    Miguel

 

 

El duende del amor Miguel Garcia Acrylique sur toile  102x153

 

Nominations

 

Paru à la fin de 2007, le petit livre d’Alain Badiou, De quoi Sarkozy est-il le nom ? (1), aurait dû faire grand bruit. A moins que le grand livre du même auteur ait vocation à bruire, avant que sa démonstration éclate au grand jour comme au petit jour.

Armé d’épingles ou d’aiguilles, acupuncteur, tailleur ou entomologiste des discours politiques, Alain Badiou n’épargne personne – ou alors ne serait-il plus philosophe mais courtisan, d’autres y ont succombé.

Beaucoup l’ont pensé et dit, la différence entre les deux candidats à la présidentielle française de 2007 n’était pas si nette. Badiou leur trouve un  bien plaisant commun dénominateur, « la possibilité d’un néo pétainisme de masse » (2). Et il précise bien que « le pétainisme présente les abominations subjectives du fascisme (peur, délation, mépris des autres) sans son élan vital ».

Il analyse aussi  le contexte électoral du début de 2007 comme étant le conflit entre deux peurs, l’une primitive, « centrée sur les boucs émissaires traditionnels »  et l’autre dérivée, qui a peur de ce que la première peut donner comme résultat. On aura reconnu droite et gauche, enfin ce qui en reste lisible aujourd’hui.
Badiou nous confie aussi son point de vue personnel sur Sarkozy : « Moi, si j’avais peur, je ne penserais pas du tout à ce type de personnage pour la conjurer (…) ». Il est convaincu qu’il n’est « pas très dangereux », puisqu’il « ne peut aller nulle part sans une garde rapprochée épaisse comme un mur ». Les coups de feu tirés tout récemment en l’air par les soldats égyptiens, pour éloigner les journalistes comme on le ferait pour des moineaux ou des étourneaux, ne démentent pas le propos de Badiou. Il rend même en passant un hommage à De Gaulle, dont la vertu politique principale était de ne jamais avoir peur…

Entre la désorientation due à la « décomposition morale et subjective du parti socialiste » et l’ « incoercible nostalgie pour les temps du repérage clair », les rats commencent à courir partout et signalent les prémisses d’un tremblement de terre. Contre l’impuissance et l’asthénie dépressive, le Docteur Badiou, s’appuyant sur le Docteur Lacan, préconise de trouver et tenir, y compris coûte que coûte, un point réel, de pensée et d’agir, permet « d’élever l’impuissance à l’impossible ».

Suivent, toujours dans ce seul deuxième chapitre, d’autres considérations sur les rats, dont Sarkozy aurait une profonde connaissance de la subjectivité : « Il les attire avec virtuosité ». Plus loin : « Le rat est celui qui a besoin de se précipiter dans la durée qu’on lui offre, sans être du tout en état de construire une autre durée ».

Et aussi la nécessité d’en finir avec le spectre de Mai 68, pour préserver l’hégémonie du « service des biens » (Lacan) comme « maxime du monde ».

Avec une année qui commence, du côté des officines, dans la franchise (3), il est utile aussi de rappeler avec Badiou le cinquième point de son développement, le « point d’Hippocrate ».  Tout malade qui demande à être soigné par un médecin doit l’être sans aucune condition d’âge, de nationalité, de « culture », de statut administratif ou de ressources financières. Et le philosophe de décocher une flèche en direction des « praticiens (…) qui se font les agents ou les complices d’une gestion bureaucratisée pratiquant de plus en plus une ségrégation insupportable ».

Nous garderons pour une autre chronique le huitième point, « il y a un seul monde », celui unique des femmes et des hommes vivants, où existe « l’infinité des différences ».

Aurons-nous convaincu celles et ceux qui nous lisent d’aller quérir d’urgence ce traité de compréhension aiguë du monde d’aujourd’hui, dont le champ s’étend bien au-delà des seuls chagrins et rancœurs hexagonaux ?

 

Jean-Yves Feberey (Nice)

 

(1)     Nouvelles éditions Lignes

(2)     A voir ou à revoir : Le vieil homme et l’enfant (1966) de Claude Berri

(3)     Depuis le 1er janvier 2008, les assurés sociaux français doivent s’acquitter d’une franchise de 50 centimes d’euro par boîte de médicament prescrite, avec un maximum de 50 euro dans l’année.

 

2008 : Garder les yeux ouverts

Editorial du FORMINDEP le 1er  janvier 2008

Garder les yeux ouverts. Tel est le vœu que le Formindep formule pour cette année, pour les patients-citoyens, professionnels et responsables de santé, en France et dans le monde.

Lorsque des soignants parés de leurs titres, au lieu de soigner, sont enrôlés par les firmes pharmaceutiques pour être les agents de la promotion de médicaments aux bénéfices incertains, c’est en ayant les yeux ouverts que nous disons qu’il y a un problème [1] [2]. Lorsque les yeux ouverts, nous voyons des journalistes, a fortiori de media de service public, mettre sans discernement ni esprit critique leur métier au service des firmes et de la promotion de leurs produits, alors il y a un problème [3] [4]. Lorsque les firmes pharmaceutiques profitent de l’absence de politique de santé publique pour lancer des campagnes publicitaires sous le couvert d’actions de santé publique, nous pouvons dire les yeux ouverts qu’il y a un problème [5]. Lorsque nous voyons des réseaux de professionnels de santé créés pour les patients, comme l’ANCRED pour le diabète par exemple, se mettre au service d’une firme pharmaceutique, pour promouvoir ses médicaments sous couvert de formation médicale, alors il y a un problème. Lorsqu’une loi, censée aider les citoyens et les patients à comprendre ce qu’il leur est dit sur les médicaments avec lesquels on veut les soigner, n’est ni appliquée par les médecins, ni défendue par les journalistes, alors il y a un problème. Lorsque nous voyons l’organisme d’assurance maladie solidaire se révéler incapable, sous la pression des politiques eux-mêmes soumis aux lobbies marchands, de prendre des mesures efficaces d’économie dans l’intérêt général, et travailler ainsi à sa propre disparition, alors il y a un problème [6] [7] [8]. Lorsqu’à travers les “franchises” sur le remboursement des soins, le pouvoir politique décide de faire payer ceux qui n’y peuvent rien, c’est-à-dire les malades, pour permettre aux intérêts industriels et corporatistes de continuer à se “payer sur la bête”, alors les yeux ouverts nous savons qu’il y a là un vrai problème [9] [10]. Lorsqu’enfin les pouvoirs publics français et européens s’apprêtent, contre toute réalité scientifique et économique, à autoriser les firmes pharmaceutiques à promouvoir directement leurs produits auprès des malades et des citoyens, alors nous voyons qu’il y a un problème [11] [12].

Bien sûr, direz-vous, dans ce monde globalisé c’est la même chose dans les autres secteurs de la société. Aucun n’échappe maintenant au mélange des genres, à la pseudo-transparence, à la culpabilisation des faibles, à la dérégulation des rapports sociaux, à la collusion des intérêts privés et publics, à l’absence de scrupule et au cynisme, au refus de la réflexion éthique dans l’intérêt général, etc. Alors pourquoi le secteur de la santé serait-il épargné plus que les autres ? Pourquoi ? Parce que, dans un univers où tout devient à vendre, la santé doit rester, avec l’éducation, un des domaines de l’activité humaine où la finalité n’est pas le développement matériel et financier, mais celui de la dignité et du respect de tout homme. Se battre pour préserver ces îlots de gratuité contribue à défendre l’idée d’une humanité présente sur terre d’abord pour être et pour grandir, avant d’avoir et de produire. Les soignants et responsables de santé qui décident, consciemment ou non, de rejeter cette mission altruiste en se soumettant à des intérêts corporatistes et marchands, ne mettent pas seulement en jeu la qualité des soins et la santé des citoyens que nous sommes tous. Ils fragilisent les bases mêmes de ce qui fonde l’humanité.

Rejoindre le Formindep c’est, à sa modeste mesure et avec d’autres, garder les yeux ouverts avec lucidité et colère sur ce constat. Et s’unir et agir pour le refuser.

Bonne année 2008, clairvoyante et tonique !

[1] Voir l’éditorial du Formindep consacré à l’émission “le téléphone sonne” du 21 novembre 2007 de France Inter vantant le Champix°.

[2] Voir la prestation du Professeur Bertrand DAUTZENBERG dans le journal télévisé de France 2 du 18 décembre 2007, dont les liens avec la firme Pfizer vendant le Champix° ont été révélés par l’hebdomadaire Marianne (Jaillette JC - La santé malade du lobby pharmaceutique - Marianne - n° 542 - 8 septembre 2007 - page 61).

[3] Voir les notes 1 et 2 précédentes.

[4] Voir l’extrait du journal télévisé de 13 h de France 2 du 27 décembre 2007, publicité directe et non déguisée pour le Champix° donnant une information fausse, le Champix° n’ayant pas été comparé aux substituts nicotiniques : "Varénicline, plus chère et pas mieux que la nicotine" - Rev Prescrire 2007 ; 27 (283) : page 345.

[5] Voir l’éditorial du Formindep consacré à l’émission “le téléphone sonne” du 21 novembre 2007 de France Inter vantant le Champix°, particulièrement le premier extrait proposé.

[6] Voir le site du PUPPEM et l’expérience des délégués à l’assurance maladie de l’Aude.

[7] Voir le blog de Claude Frémont, ancien directeur de la CPAM de Nantes.

[8] Lire sur le site de la revue Pratiques, l’article sur le projet de loi sur le financement de la sécurité sociale 2008.

[9] Voir le collectif national contre les franchises.

[10] Lire l’enquête du magazine Que Choisir : "Sécurité sociale : comment les labos et les médecins creusent le trou…" parue le 25 septembre 2007.

[11] Voir la revue Prescrire : Mainmise des firmes pharmaceutiques sur l’information-santé en Europe.

[12] Voir la revue Prescrire : Programmes d’"aide à l’observance" : non aux confusions.

http://www.formindep.org/spip.php?article152

 

 

Carnoules (Var), janvier 2008

 

 

Lien pour rire : où se trouve Budapest ?

 

Un jeu télévisé très classique sur fond d’ignorance de la géographie, nous n’en dirons pas plus, l’ensemble n’étant pas forcément politiquement correct…

http://www.koreus.com/video/blonde-europe-pays.html

 

 

 

Cousinages gastronomiques :

Töki pompos &Flammeküeche...

 

 

A l’approche de Noël, beaucoup de villes européennes se couvrent de marchés où le kitsch le plus violent côtoie l’artisanat le plus traditionnel, mais où les choses qui se boivent ou se mangent ont toujours une place extrêmement privilégiée. En Europe centrale comme ailleurs, le vin chaud fait partie des incontournables, mais à Budapest, il s’éponge volontiers à l’aide d’une spécialité donnée parfois pour transylvaine, l’Erdelyi kenyerlangos, beaucoup moins (voire pas du tout) connue sous le nom de töki pompos, qui  lui vient d’un mot d’ivrogne au festival de Sziget (voir le lien en hongrois ci-dessous).

Il s’agit d’une pâte à pain, épaisse, recouverte de crème fraîche elle aussi épaisse (le fameux tejföl), d’oignons, de lard et de fromage. Le tout est passé au four à bois, à la flamme, d’où le nom originel de langos (qui s’applique aussi à des beignets faits d’une pâte à base de pommes de terre plongée dans l’huile brûlante).

Quoiqu’il en soit, cette préparation généreuse en calories n’est pas sans rappeler la célèbre « tarte flambée » alsacienne, qu’on devrait d’ailleurs dire «  flammée » pour être précis. Simplement, la pâte à pain est-elle généralement plus fine dans la préparation alsacienne.

Ce concept culinaire commun nous a semblé digne d’âtre rapporté ici, comme nouvelle et savoureuse illustration du proverbe italien tutto il mondo è paese.

Zsizsik Janos

http://kalandozasok.blog.hu/2007/11/25/szigetrajongok_kedvence_a_toki_pompos

 

http://fr.wikipedia.org/wiki/Tarte_flamb%C3%A9e

Dessein pour demain !

 

 

Dessin de Francine Carpentier

 

Ses mains comme tétanisées devant sa bouche semblaient agrippées à un trapèze suspendu au-dessus du vide. Cet instant dura quelques secondes. Était-il fou ? Était-il malade ? Non car il continuait à parler calmement de sa voix harmonieuse. L’avait-il fait exprès ? Mais pourquoi ? Le doute m’envahissait. Ce geste était en complète contradiction avec sa façon de parler. J’étais déconcertée. Ses mains auraient arraché un bébé de sa relation fusionnelle à sa mère. Cela aurait été une interprétation possible. Sur le moment je ne pus parler de ce geste et quand je pus, il dit ne pas s’en souvenir. Dès lors ce geste m’obséda et je n’avais de cesse de le comprendre. Curieusement ce geste m’avait attachée. J’ai désiré celui qui l’avait fait. Je l’ai aimé à partir de ce moment… à moins que déjà sa voix mélodieuse, ses cheveux soyeux, ses yeux attentifs, sa taille bien proportionnée n’aient œuvré en douce ! Cela serait comme si tout devait aboutir à ce geste et en repartir… De ce geste est né quelque chose d’étrange, un coup de foudre. J’ai été séduite par ce geste fou, mais je devais y être préparée déjà. C’était incompréhensible. J’ai suivi sa trace partout où je pouvais pour en connaître un peu plus sur lui. Mais qui lui ? Le geste ou l’auteur du geste ? Il restait insaisissable. J’ai fait des voyages, des recherches sur Internet pour avoir une explication, mais à chaque fois ce que je cherchais se dérobait un peu plus. Mais qu’est-ce que je cherchais ? Je voulais, je crois, rencontrer cet homme totalement, sans limite et percer son mystère. Je ne pouvais lui parler qu’en tête-à-tête. Là, j’avais l’impression qu’il était très proche. En dehors de ces moments-là, il était plus étranger que tous les autres étrangers.

 

Je voulais me détacher avec lui d’une relation qui me faisait souffrir. Cette relation me posait un problème d’attachement et de soumission à un autre que j’ai voulu séduire car je l’aimais. Un jour, je lui ai montré mes seins en lui récitant un poème que j’avais composé à son intention. Un baiser innocent entre nous s’en est suivi et la relation est devenue plus intime. Mais je l’ai trahi en révélant à mon mari ce qui s’était passé. Son rôle désormais ne serait plus double ni trouble… Il prit la décision irrévocable de mettre fin à cette idylle. C’était le premier homme que j’avais aimé de façon si intense et à qui j’avais pu le dire. J’ai eu un grand chagrin d’amour. Il m’a fallu quatre ans pour aller voir ailleurs.

 

C’est alors que j’ai été entre ces mains qui m’ont déconcertée. C’est comme si je voyais en miroir ce qui s’était passé. C’était la réflexion, au sens propre et au sens figuré, de cet instant de folie. Les rôles étaient inversés comme le « m » de mains et le « s » de seins, comme le « s » de ses et le « m » de mes. J’ai vu mes seins comme ses mains. Ses mains étaient la parabole de mes seins. Mais il n’y avait toujours pas d’explication. Il s’est exprimé avec ses mains et moi avec mes seins.

 

Mes deux seins, ses deux mains…

Médecin cède main…

Sans donner un patin

Sans poser de lapin

 

Mais j’en ai assez de ces jeux de mots. Il y a transfert, mais je ne vois pas la différence avec un véritable amour. Je suis dans la désespérance. Je veux rompre ce qui m’enchêne, mais je plie tristement. Je suis dans la dépendance. Et alors ? Je me sens terriblement seule et le goût de  vivre m’a abandonnée. Je fais semblant pour le moment. Je n’ai aucun dessein pour demain…                                           Enaïra

Colloque

 

Magyar Pszichiátriai Társaság

Sopron, 2008. január 23-26.

 

La Société Hongroise de Psychiatrie, présidée par le Docteur Harmatta Janos, est un de nos principaux partenaires, avec l’Association des Médecins Francophones de Hongrie, actuellement présidée par le Professeur Wenger Tibor, organise son Colloque annuel du mercredi 23 au samedi  26 janvier 2008  à Sopron. Le lien ci-dessous permet d’accéder au programme et aux renseignements pratiques. Nous avons appris que l’Atelier d’Art de Tündérhegy, le service du Docteur Harmatta,  y présenterait son travail le 24 janvier, notamment grâce à Bea Bocz.

 

http://mpt2008.blaguss-congress.hu/

Az elmúlt évben soha nem gondolt kedvezőtlen folyamatok indultak el vagy teljesedtek ki a pszichiátria területén. Az Országos Intézet azonnali megszüntetése, az osztályok, szakmai közösségek szétdarabolása, felbomlása olyan folyamat volt, amelyet egy évvel ezelőtt még nem is sejtettünk. Felgyorsult a fiatal kollégák elszivárgása külföldre, számos helyen az országban az osztályokat ellátó teamek létszáma kritikusra vagy az alá csökkent, a szakrendelések még zsúfoltabbak, a megszorítások a receptírás területén sokakat elbizonytalanítanak közülünk, mindenütt csak a költségek számítanak illetve azok leszorítása, a szakmaiság elhanyagolható tényezővé vált. Az utánpótlás láthatóan kevés, a szakmai fórumok szavát a döntéshozók alig hallják meg, a kikényszerített átalakulások jövője, perspektívája nem látszik. Hihetetlen kihívás ilyen körülmények között minőségi munkát végezni, a betegeket megfelelő szinten kezelni, egymást erősíteni és a pszichiáteri identitásunkat megőrizni. A Magyar Pszichiátriai Társaság Vezetősége ebben a helyzetben a XIV. Vándorgyűlés témájának kissé paradoxul A Bomlás Virágai címet választotta. De ha nem a körülöttünk lévő rombolást látjuk csak, hanem egy kicsit előre tekintünk, észrevehetjük és sorolhatjuk azokat a kis kezdeményezéseket, virágokat, amelyekből a pszichiátria épülhet, újra kezdhet, alakulhat és túlélhet. Az emberi pszichikummal foglalkozó gyönyörű szakmánk hihetetlen fejlődésben van a megismerés, kutatás területén, a betegeink száma nem csökken, hanem átalakuló világunkban csak növekszik, a minőségi gyógyítás iránti elkötelezettség bennünk eddig sem az annyira kedvező körülmények hatására alakult ki. Sopronba megyünk ismét a XIV. Vándorgyűlésünkkel, bajainkkal, reményeinkkel. Szeretettel hívunk minden kollégát az együvé tartozás, szakmánk színvonalának emelése érdekében. A jövőnket magunk is formáljuk, miközben egymást támogatjuk.

Harmatta János
a Szervező Bizottság elnöke

Feuille volante - Le malentendu

 

Nous avons reçu cet énigmatique récit aéronautique d’un de nos fidèles lecteurs. Mais sans doute faut-il le lire entre les lignes : et s’il s’agissait du rêve d’un assureur enfin parvenu à prendre… des risques ?

 

Antoine B.est un ancien juriste de la Compagnie d’assurance « Assicurazione Generali » basée à Venise. Diplômé d’études approfondies de droit maritime, Antoine B., atteint par la limite d’âge, a fait valoir ses droits à la retraite. La mer, sur laquelle il a navigué plus de trente années lui fait peur .Elle lui a toujours fait peur. C’est le ciel qui attire Antoine B. Et les avions qui sont dans le ciel.

La carrière de pilote d’Antoine B. est émaillée de minuscules anecdotes. Voici la première.

Ce jour-là Antoine B. effectue l’exercice nommé « tour de piste ». Il a décollé peu de temps auparavant de la piste 17 (ce nombre a son importance, nous en reparlerons dans un chapitre ultérieur) de l’aérodrome de Cannes. Le vent est calme, la visibilité est supérieure à 10 kilomètres, la base des nuages est à 3000 pieds.  La vitesse de montée est de 130 kilomètres par heure. A une altitude de 300 pieds, Antoine B. éteint les phares de l’avion et rentre ses volets sustentateurs. Il referme un peu l’assiette de l’avion ; la vitesse atteint 150 kilomètres par heure.

A 500 pieds Antoine B. s’assure que les conditions de sécurité sont réunies et incline son avion de 15 degrés à gauche. Il continue sa montée à 150 kilomètres par heure. Parvenu à 1000 pieds il effectue un deuxième virage de 15 degrés à gauche et place son avion en vol horizontal. Le lecteur attentif a compris que le voici donc sur une trajectoire parallèle à sa trajectoire d’envol. Sur sa gauche  Antoine B. aperçoit le seuil de la piste 17 ; c’est de là qu’il a décollé il y a quelques instants. Lorsqu’il arrive à sa hauteur (c’est une façon de parler car le seuil de piste est à l’altitude zéro et l’avion à celle de 1000 pieds) Antoine B. déclenche son chronomètre. Il va continuer à voler horizontalement  60 secondes à 150 kilomètres par heure. Il a allumé son phare d’atterrissage et ressorti ses volets sustentateurs. Les 60 secondes écoulées,  Antoine B. fait virer l’avion de 20 degrés à  gauche. Il réduit la puissance du moteur et met l’avion en descente avec une assiette de  moins 3 degrés. Antoine B. est assis à gauche dans le cockpit. Il continue à descendre. La  projection au sol de la trajectoire de son avion est alors perpendiculaire à la piste  . A 700 pieds dernier virage à gauche .La trajectoire de l’avion d’Antoine B. est désormais dans l’axe de la piste.

Cher et patient lecteur, récapitulons (Antoine B. pendant ce temps est très  occupé) : l’avion a volé 60 secondes à 150 kilomètres par heure depuis le seuil de piste ; il est à une  altitude de 700 pieds : la pente de sa trajectoire d’atterrissage est donc facile à calculer.

Maintenant cher et patient lecteur rappelons-nous que l’atterrissage consiste à amener l’avion en contact avec le sol.

Mais, toujours cher et plus que jamais patient lecteur une question se pose : Antoine B. est-il seul dans l’avion ? Non, il ne l’est pas.

Pourquoi l’auteur de ces lignes ne vous l’a-t-il pas dit dès le début ? Il pourrait vous dire : c’est le privilège d’un auteur d’écrire ce qu’il veut. Il ne vous dira pas cela car cher et patient lecteur, si vous avez tenu bon jusqu’ici, vous méritez une autre réponse : sur le siège de droite a pris place un officier-instructeur qui, depuis le début se tait, ne touche à rien et, le visage fermé (c’est l’impression d’Antoine B.) écrit sans arrêt sur un petit carnet fixé sur sa cuisse droite.

Nous avons laissé Antoine B. à  20 secondes de l’impact.

A 15 secondes de l’impact un évènement soudain se  produit dans le cockpit : l’Instructeur appuie sur la commande de mise en relation radio avec le contrôle aérien  et de sa voix  calme, sèche et froide, prononce, à l’intention du contrôleur aérien, ces mots « allumes-moi le papi » Certes Antoine B. a largement l’âge d’être grand père. Mais …

Alors, entre la 15ème et la 13ème seconde avant l’impact, dans le cerveau d’Antoine B. se bousculent diverses réflexions qui n’ont rien à voir avec le pilotage mais tout à voir avec  ce qu’il faut bien nommer l’amour propre.

Peut-être cher et patient lecteur avez-vous résisté jusque là, peut-être par ce que vous êtes patient, peut-être parce que, ayant employé votre énergie à cette lecture, de guerre lasse vous vous dites « allons jusqu’au  bout » ; peut-être aussi par ce que vous pensez, cher lecteur « mais où ce fou veut-il nous conduire ? »

Nous arrivons au bout de cette histoire. Nous avons laissé Antoine B.  dans le siège de gauche,  son instructeur dans le siège de droite, à 13 secondes de l’impact.

Vous le voyez, cher lecteur, le temps dans le cockpit n’est pas semblable au temps de la lecture.

Je sais, vous allez me quitter. Alors je vous dévoile la fin. Est-elle heureuse ? Oui, elle l’est.    Enfin, je ne sais pas.  Peut-être.

A 13 secondes de l’impact une batterie de projecteurs  rouges et blancs s’allument en début de piste. C’est le système lumineux d’indicateur de pente. On l’appelle aussi « indicateur de plan d’approche  de précision ». Les Anglais le nomment ‘Precision Approach Path Indicator » et les pilotes disent simplement : le  PAPI.

A deux secondes de l’impact, Antoine B. redresse son avion. L’impact est doux. C’est, presque, un « kiss landing ».

« Tu as été absent deux secondes ; où étais-tu ? » A cette question de son Instructeur Antoine B. a répondu, plus tard, sur le parking, une fois l’avion immobilisé et l’hélice arrêtée…

Papillon

 

 

Sommaire

 

Budapest, décembre 2007

 

Page 1      Editorial

Page 2      Programme Budapest, 8 & 9 mai 2008

Pages 3-9   Le scandale Sarajevo (v.fr.)

Pages 9-16  Il scandalo Sarajevo (v.it.)

Page 16       Performance aux Pays-Bas

Page 17       Poème et toile de Miguel Garcia

Pages 17-18 Nominations

Pages 18-20 Formindep

Page 20 Lien pour rire – Cousinages gastronomiques

Page 21       Dessein pour demain !

Page 22       Colloque de la Société Hongroise de psychiatrie

Pages 23-24 Feuille volante – Le malentendu

Page 24        Sommaire

 

«  Il Volantino Europeo »

Bulletin internautique trimestriel de l’Association Piotr-Tchaadaev, 9, rue du Parc-de-Clagny, 78000 Versailles. Président d’honneur : Alexandre Nepomiachty

N° FMC  Piotr-Tchaadaev

11 78 0511778

Toute correspondance ou article est à adresser à  Jean-Yves Feberey

Secrétaire de Rédaction provisoire

(depuis 2003)

9, rue Bonaparte  F 06300 Nice,

ou à

jean-yves.feberey@wanadoo.fr

ou encore à

piotr-tchaadaev@wanadoo.fr

PROCHAINE PARUTION LE 15 AVRIL2008

Manuscrits à remettre SVP pour le 31 mars 2008